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Traditions du temps des sucres

Les traditions du temps des sucres forment un ensemble de pratiques culturelles. Elles englobent non seulement des connaissances et des savoir-faire propres à l’exploitation des érablières pour la production d’une gamme variée de produits, mais aussi des pratiques sociales associées au temps des sucres, qui marque la fin de l’hiver québécois.

La collecte de la sève sucrée produite par les érables au dégel printanier est une activité pratiquée par les Autochtones depuis des temps immémoriaux. Les colons leur empruntent ensuite la technique : l’entaillage des érables à la hache, la récolte de l’eau sucrée dans des récipients d’écorce ou des auges de bois et la cuisson au chaudron sur des feux de bois. Ils perfectionnent le procédé en introduisant, à la fin du XVIIe siècle, les chaudrons en métal, qui facilitent la fabrication du sucre. La technique évolue peu jusqu’au milieu du XIXe siècle, comme en témoignent de nombreuses illustrations d’époque.

Au XXe siècle, la cabane à sucre abritant un évaporateur ainsi que les chaudières en aluminium accrochées à des chalumeaux en tôle d’acier succèdent aux pratiques anciennes. Les acériculteurs courent les érables, selon l’expression consacrée pour désigner la collecte de l’eau dans des seaux, qui sont ensuite transvidés dans un réservoir tiré par un bœuf ou un cheval jusqu’à la cabane à sucre. Plus récemment, le système de tubulures reliant les érables à une pompe à vide facilite grandement le travail des acériculteurs qui exploitent des érablières de plusieurs milliers d’entailles. Toutefois, les pratiques traditionnelles se perpétuent dans les entreprises artisanales, qui sont de plus petite taille.

Le temps des sucres, c’est aussi une série de pratiques festives associées à la visite à la cabane à sucre. Les repas qu’on y sert s’inspirent des mets mangés par les sucriers d’autrefois : soupe aux pois, œufs, jambon, fèves au lard, lard salé, crêpes, grands-pères dans le sirop, etc. La partie de sucre est le clou de la journée à la cabane. Les participants peuvent alors savourer la fameuse tire d’érable, faite de sirop d’érable préalablement bouilli qui durcit en étant versé sur la neige. Cette tire refroidie est enroulée autour d’une palette ou d’un bâtonnet de bois. La partie de sucre peut se dérouler dans un contexte familial ou comme activité sociale dans les cabanes à vocation plus commerciale.

Le temps des sucres est aussi associé à un patrimoine immobilier et mobilier très riche. Les cabanes à sucre d’aujourd’hui conservent les éléments caractéristiques des cabanes traditionnelles, soit une pièce abritant les évaporateurs avec le tire-vapeur caractéristique qui perce la toiture. Les activités acéricoles ont suscité la création d’un patrimoine mobilier unique au Québec : moules à sucre (souvent décorés de motifs sculptés, dont des animaux), outils spécialisés (différents types de palettes, d’écumoires, de mouvettes, etc.), raquettes adaptées au travail à effectuer (selon la texture de la neige, par exemple). Ces artefacts sont mis en exposition ou conservés dans les érablières et les institutions muséales.

Les traditions du temps des sucres ont été désignées comme élément du patrimoine immatériel le 11 avril 2021.

Cabane à sucre du Plateau Bellevue, Saint-Hilaire, Québec, 1926 Bibliothèque et Archives Canada 1926 – Domaine public